À la tribune de l’ONU, le Président Faye plaide pour une refondation du multilatéralisme.

International - 24 MONTHS.SEPTEMBER 2025


Le Président de la République, Son Excellence Bassirou Diomaye Diakhar Faye, s’est adressé ce mercredi 24 septembre à la tribune des Nations Unies, dans le cadre du débat général de la 80ᵉ session de l’Assemblée générale, placée sous le thème : « Mieux ensemble : plus de 80 ans au service de la paix, du développement et des droits humains ».

Dans un contexte international marqué par des tensions multiples, le Chef de l’État a livré un discours empreint de lucidité et de responsabilité, appelant à une refondation du multilatéralisme et à un sursaut collectif face aux menaces globales.

Dans son allocution, le Président Faye a rappelé que quatre-vingts ans après la création de l’ONU, le monde traverse de nouvelles turbulences : expansion du terrorisme, conflits persistants, dérèglement climatique, fragilisation de l’économie mondiale et recul de la solidarité internationale.
« Nous vivons des moments de fortes incertitudes (…) comme si nous étions rattrapés par les dérives qui ont mené l’humanité à deux catastrophes majeures en l’espace d’une génération », a-t-il averti, dénonçant la logique du « deux poids deux mesures » et la prévalence de la loi du plus fort dans les relations internationales.

Le Président de la République a particulièrement insisté sur les défis sécuritaires qui frappent le continent, notamment le terrorisme au Sahel et l’instabilité politique. Il a plaidé pour un financement prévisible et durable des opérations de maintien de la paix en Afrique, avec des mandats robustes et des moyens adaptés, condition essentielle pour restaurer la stabilité.
« La paix et la sécurité ont un prix. Donnons-nous les moyens de l’assumer », a-t-il déclaré, renouvelant la solidarité du Sénégal envers les pays engagés dans la lutte contre le terrorisme.

Abordant la situation au Moyen-Orient, Son Excellence Monsieur Bassirou Diomaye Faye a dénoncé avec force la tragédie vécue par le peuple palestinien à Gaza, qualifiant la situation d’« enfer pour des millions d’âmes ». En tant que Président du Comité des Nations Unies pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, il a réaffirmé que seule la création d’un État palestinien indépendant et viable, dans des frontières sûres et reconnues, peut garantir une paix durable.

Le Chef de l’État a réitéré l’appel du Sénégal en faveur d’une réforme du Conseil de sécurité des Nations Unies, en soutenant le consensus d’Ezulwini qui revendique une représentation plus juste et équitable de l’Afrique.
Sur le plan économique, il a plaidé pour une gouvernance plus inclusive, mettant en avant la nécessité d’un cadre fiscal mondial équitable, d’un meilleur accès au crédit et de mécanismes adaptés pour alléger le poids de la dette.

Évoquant la crise climatique, le Président Faye a rappelé la « double peine » subie par l’Afrique, qui ne contribue qu’à 4 % des émissions mondiales mais subit de plein fouet sécheresses, inondations et insécurité alimentaire.
Il a appelé à une transition énergétique juste et équitable, à un accès simplifié aux fonds climatiques, et à la mobilisation de ressources pour le nouveau Fonds destiné à couvrir les pertes et dommages.

Clôturant son intervention, le Président de la République a exhorté les États membres à faire du 80ᵉ anniversaire de l’Organisation non pas le constat d’un ordre international fragilisé, mais le point de départ d’une ONU « rénovée et plus efficace, au service des peuples ».
« Le véritable obstacle n’est pas financier ni technique. Il est dans la volonté politique », a-t-il martelé, invitant à replacer la dignité humaine au cœur de l’action internationale.

Voir Vidéo de la déclaration du Président de la République :



Retrouvez ci-dessous l'intégralité du discours du Président de la République :



New York, 24 septembre 2025 - Seul le prononcé fait foi

Madame la Présidente de l’Assemblée Générale,
Chers collègues,
Monsieur le Secrétaire Général,
Mesdames, Messieurs,
Distingués délégués, 
 
Madame la Présidente, 
Au nom du Sénégal, je remercie votre prédécesseur et vous adresse tous nos vœux de succès à la présidence de cette 80ème session de l’Assemblée générale des Nations Unies.
Je renouvelle au Secrétaire général, Monsieur Antonio GUTERRES, notre soutien constant dans l’exercice de sa haute charge au service des Etats membres.
Nous nous réunissons aujourd’hui, en ces lieux symboliques du dialogue universel, comme porteurs du poids de l’histoire et de l’urgence du présent. 
Le thème de cette session, “Mieux ensemble : 80 ans et plus pour la paix, le développement et les droits de l’Homme” nous rappelle, en effet, le pacte fondateur des Nations Unies ; un pacte de coexistence pacifique, de sécurité collective et d’un ordre international fondé sur le droit. 
Sur cette base, les Nations Unies ont accompli des progrès indéniables dans la coopération solidaire pour la prévention des conflits, la promotion de la paix et de la sécurité internationales, et le règlement des différends. 
De même, des progrès significatifs ont été réalisés dans la codification de normes universelles pour la protection des droits de l’Homme et d’un ordre international plus sûr et plus apaisé.
Mais quatre-vingts ans après la création des Nations Unies, le monde vacille à nouveau, comme si nous étions rattrapés par les dérives qui ont mené l’humanité à deux catastrophes majeures en l’espace d’une génération. 
Nous vivons des moments de fortes turbulences, de défis inédits et d’incertitudes multiples : expansion du terrorisme, persistance de conflits anciens et nouveaux, dérèglement climatique, crise économique profonde, recul de la solidarité internationale et risque élevé de désintégration du multilatéralisme.
Je n’oublie pas la relance de la course aux armements, y compris dans le cyberespace. 
Le plus préoccupant, c’est la déshumanisation désolante d’un monde d’émotions sélectives, selon les intérêts et les enjeux géopolitiques. 
Il ne peut y avoir de justice fondée sur le droit quand ce qui tient lieu d’ordre international est régi par la logique du deux poids deux mesures, la loi du plus fort et l’esprit partisan. 
Dans ce contexte préoccupant, l’Afrique reste confrontée à des conflits armés, au terrorisme, en particulier au Sahel, à la criminalité transfrontalière et à l’instabilité politique.
Face à tant de défis, notre approche devrait être intégrée, combinant la prévention, la résilience et les réponses ciblées.
La paix et la sécurité ont un prix. Donnons-nous les moyens de l’assumer par un financement prévisible et pérenne des opérations de soutien à la paix en Afrique, 
avec des équipements adéquats, et des mandats et règles d’engagement robustes. C’est la seule façon de faire face au fléau du terrorisme et de rétablir un minimum de sécurité et de stabilité dans les zones affectées.
Je renouvelle ici la solidarité du Sénégal envers les pays frères engagés au quotidien dans la lutte contre le terrorisme. 
Au Moyen Orient, le peuple palestinien continue de vivre la pire des calamités, que les mots ne peuvent même plus exprimer. Sous le fracas quotidien des bombes, toutes les limites ont été dépassées. Nous ne pouvons ni nous taire, ni détourner notre regard. Gaza ne vit plus. Gaza terre de larmes, de sang et de sueur, est devenue un enfer pour des millions d’âmes de tous âges, piégées dans une prison à ciel ouvert. Hommes, femmes et enfants agonisent tous les jours, privés de nourriture, d’eau et de soins de santé. 
Le Sénégal réitère sa ferme condamnation de cette tragédie que rien ne saurait justifier. En sa qualité de Président du comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien, le Sénégal considère que seule la création d’un Etat palestinien indépendant et viable apportera une paix durable pour toutes les parties, chacune à l’intérieur de frontières sûres et internationalement reconnues. 
Mesdames, Messieurs,
Il y a quatre-vingts ans, les pères fondateurs s’engageaient, à travers la création de l’ONU, à préserver les générations futures du fléau de la guerre qui, par deux fois en l’espace d’un quart de siècle, avait causé des millions de morts et d’indicibles souffrances.
Au nom du Sénégal, je rends hommage aux pionniers et à tous ceux qui ont incarné les valeurs universelles de l’Organisation, parfois au péril de leur vie.
Dans ce monde en crise, les principes et les actes doivent rester les mêmes :
La paix plutôt que les conflits ;
la justice plutôt que l’indifférence ;
le partenariat plutôt que les rapports de force.
Mais cela n’est possible que par un multilatéralisme fort et revitalisé, pour en faire un cadre unique d’action pour la paix et la stabilité, par le dialogue, la concertation et la résolution pacifique des différends.  
La survie du multilatéralisme exige qu’il retrouve ses principes fondamentaux : la responsabilité partagée et une solidarité active, le respect du droit international et une justice universelle, conformément aux Statuts de la Cour Internationale de Justice et de la Cour Pénale Internationale. 
En outre, nous ne pouvons occulter l’impératif de réforme de la gouvernance politique, économique et financière mondiale.  
L’ONU, par sa vocation universelle, doit agir en pionnière, des délibérations et des décisions plus démocratiques, plus légitimes et plus représentatives de ses Etats membres qui sont passés de 51 en 1945 à 193 aujourd’hui. 
Je renouvelle le soutien du Sénégal au consensus d’Ezulwini pour une représentation juste et équitable de l’Afrique au Conseil de sécurité. 
Il est temps aussi d’instaurer une gouvernance économique et financière mondiales plus juste et plus inclusive, pour répondre aux véritables besoins du financement du développement durable.
Nous savons tous que l’aide publique n’est pas la solution. 
D’autres leviers existent, notamment : 
un cadre fiscal mondial équitable afin que l’impôt soit payé là où la richesse est produite ; 
l’accès au crédit dans des conditions soutenables afin que la gestion du fardeau de la dette n’entrave pas les efforts de développement de nos pays ; 
enfin, la mise en œuvre effective de l’engagement de Séville, du pacte pour l’avenir et des Objectifs de Développement Durable pour un accès élargi à la santé, à l’eau, à la nourriture, à l’éducation, à l’énergie et au numérique.  
Le réchauffement climatique mérite aussi notre attention. Il n’est pas une menace mais une question existentielle, une réalité qui frappe plus durement ceux qui y contribuent le moins, comme l’Afrique avec moins de 4% des émissions mondiales. 
Et pourtant, sécheresses, inondations, érosion côtière et insécurité alimentaire rythment désormais la vie de nos populations. 
C’est une double peine devenue insoutenable. 
Le Sénégal renouvelle son attachement à l’accord de Paris sur le climat et appelle à une transition climatique juste et équitable, par l’exploitation de nos ressources disponibles pour l’accès universel à l’électricité et l’amorce d’une industrialisation compétitive. 
La lutte contre le réchauffement climatique se fera indubitablement avec des financements conséquents pour l’adaptation, la simplification de l’accès aux fonds climatiques et la garantie des transferts de technologies. 
Le Sénégal salue la création du Fonds pour répondre aux pertes et dommages et appelle à la mobilisation de la solidarité internationale pour la constitution de ses ressources, afin de financer les opérations sur le terrain.
Excellences, Mesdames et Messieurs, 
Face aux urgences et aux défis nombreux et complexes, nous ne sommes pas démunis. 
Le monde dispose des moyens nécessaires pour nourrir ceux qui ont faim, éduquer nos enfants, soigner les malades et faire taire les armes. 
Le véritable obstacle n’est ni financier et technique ni matériel. Il est dans la volonté politique de faire du multilatéralisme un instrument de solidarité collective ; de coopération plutôt que de confrontation, 
pour un avenir où la dignité humaine sera au cœur de nos décisions. 
Alors, faisons de ce 80ème anniversaire des Nations Unies non pas le constat d’un ordre épuisé, mais le point de départ d’un nouvel espoir : celui d’une Organisation rénovée et 
plus efficace au service des peuples qu’elle incarne.  
Le Sénégal reste fidèle à son engagement de travailler dans ce sens avec tous les membres de l’Organisation ; prêt à jeter les ponts, prêt à porter les réformes, prêt à poursuivre notre œuvre commune pour un monde de paix, de justice et de solidarité.  
Je souhaite plein succès aux travaux de la 80ème session de l’Assemblée générale. 
Je vous remercie de votre aimable attention.