Discours prononcée à l’occasion de la cérémonie de remise du diplôme de Docteur Horis Causa du Conservatoire National des Arts et Métiers
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Discours prononcée à l’occasion de la cérémonie de remise du diplôme de Docteur Horis Causa du Conservatoire National des Arts et Métiers

Discours — 21 décembre 2016

Monsieur Jean-Paul Herteman, Président du Conseil d’Administration du Conservatoire National des Arts et Métiers,

Monsieur Olivier Faron, Administrateur  général du CNAM,

Madame la Présidente du Conseil économique, social et environnemental du Sénégal,

Mesdames, Messieurs les Ministres,

Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs,

Mesdames, Messieurs les membres du personnel administratif et pédagogique du CNAM,

Chers élèves,

Chers invités,

Monsieur le Président, avant tout propos, je tiens à m’acquitter de la dette du visiteur et du récipiendaire.

Je vous remercie de tout cœur, ainsi que tous vos collaborateurs, pour l’accueil si convivial que vous me réservez ici, avec mon épouse et ma délégation, à l’occasion de ma visite d’Etat en France.

Je vous suis reconnaissant de l’honneur que vous me faites, et par-delà ma personne à mon pays, en me conférant le titre de Docteur Honoris causa de votre prestigieux établissement.

J’accepte cette distinction avec humilité et émotion, parce que j’ai à l’esprit la trajectoire lumineuse qui porte le CNAM depuis plus de deux siècles.

A la croisée de la foi et de la raison, le CNAM se veut, à juste titre, un enfant des Lumières, parce que né de ce mouvement unique de l’histoire où l’homme, s’élevant par la science et l’intellect, a percé le voile épais de l’obscurantisme et de la superstition pour mettre fin aux préjugés et aux abus. 

Comment ne pas rester humble, en pensant à tous ces brillants esprits qui ont marqué le Siècle des Lumières, dont votre illustre parrain, l’abbé Grégoire ?

Initiateur du CNAM en 1794 qu’il a voulu  comme établissement de formation aux métiers pour perfectionner l’industrie nationale, l’abbé Grégoire a aussi marqué son époque par son humanisme anti esclavagiste.

Dans le tumulte ténébreux de la traite des noirs, il a été du bon côté de l’histoire, la grande histoire. Il a été du côté des justes, en réclamant urbi et orbi la fin de l’esclavage.

Il l’a fait en interpellant la conscience étriquée des esclavagistes de Saint-Domingue, Haïti aujourd’hui, par une question restée célèbre : « Les âmes ont-elles une couleur ? ». Et il l’a fait dans son adresse magistrale au gouvernement du Directoire, après la Révolution française de 1789, par l’une des formules légendaires dont il avait le secret : « Le doute méthodique, -dit-il- en déblayant les idées reçues, a émoussé le glaive de l'intolérance, éteint les bûchers de l'inquisition et affranchi les nègres.»

Venant d’Afrique, voilà pourquoi je vous ai dit mon émotion ; et voilà pourquoi, au nom de toute ma délégation, je veux  saluer la mémoire de votre parrain, le  prêtre des Lumières.

Enfin, une autre raison, encore plus personnelle, me lie à votre établissement. C’est ici qu’a été formé mon Premier Ministre, à l’Institut Informatique d’Entreprise, alors rattaché au CNAM, à la Cour Vaucanson, disait-on à l’époque, avant de prendre son envol pour devenir l’École nationale supérieure d'informatique pour l'industrie et l'entreprise.

Eh bien, Monsieur le Président, je peux vous assurer que vous m’avez donné un excellent Premier Ministre !

Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs,

Depuis toujours, l’homme a pensé, cherché, inventé et découvert pour résoudre l’équation  quotidienne du pourquoi et du comment, et satisfaire le besoin d’être et de mieux être.

En offrant une formation professionnelle personnalisée, ouverte à tous les âges et à plusieurs corps de métiers, le CNAM, faisant corps avec l’adage selon lequel on ne finit jamais d’apprendre, le grand mérite de donner à chacun et à tout moment, la chance de réveiller et de perfectionner son talent.

Voilà une vocation fort louable, en ces temps où le savoir et le savoir-faire courent  constamment le risque d’obsolescence, sous l’emprise effrénée de l’innovation.

Le besoin de mise à jour des connaissances n’en est que plus pressant, puisque l’acquisition initiale du savoir ne suffit plus. Encore faudrait-il l’adapter aux mutations qui accompagnent l’économie du savoir.

Que l’on pense par exemple à l’espace numérique, devenu un vaste réseau de signes, de codes et de protocoles d’où sont exclus les non-initiés, même s’ils justifient d’un louable  niveau d’études et de formation.

Que l’on pense également aux reconversions dans la formation et la carrière des personnels comme mesures d’accompagnement des stratégies d’adaptation et de restructuration de l’entreprise.

En réalité, dans tous les domaines de l’activité économique, le niveau de performance et de productivité est plus que jamais tributaire de la qualité des ressources humaines, de l’employé  dit subalterne au cadre intermédiaire ou de conception.

A mes yeux, la formation des ressources humaines que vous dispensez ici, pour aider des générations d’hommes et de femmes d’horizons divers à mettre en valeur leur potentiel et rester des acteurs accomplis de leur temps, est fondamental.

Voilà pourquoi, à côté de la transformation structurelle de notre économie et de la gouvernance institutionnelle, j’ai inscrit le capital humain parmi les trois piliers qui portent le Plan Sénégal Emergent (PSE), que nous avons présenté à la communauté des partenaires publics et privés en février 2014 à Paris.

Le PSE est notre nouvelle stratégie de développement économique et sociale visant à mobiliser tous nos potentiels pour faire du Sénégal une économie émergente à l’horizon 2035 avec un taux de croissance annuel de 7% au moins, sur la durée. Nous en sommes aujourd’hui à 6,5 %

Pour transformer l’économie de façon durable, il faut des ressources humaines de qualité, aptes à satisfaire les besoins du marché de l’emploi et à animer tous les domaines d’activité qui favorisent le développement.

C’est ce que nous recherchons à travers le renforcement du quantum horaire des filières scientifiques et techniques et  la mise en place d’un programme d’enseignement technique et professionnel axé sur une formation duale, alliant les études à la pratique en entreprise.

Nous avons lancé à cet effet un programme de lycées professionnels et de Centres d’apprentissage aux métiers. Déjà, le  Centre de formation aux métiers du Bâtiment et des Travaux Publics est opérationnel sur le site de Diamniadio, un nouveau pôle urbain que nous développons à trente kilomètres de Dakar, doté d’une Cité du Savoir, qui accueillera prochainement une plateforme numérique du Groupe Atos et une autre dédiée à la génétique moléculaire avec l’Université d’Evry Val-d’Essonne.

En outre, à partir de 2017, nous mettrons progressivement en service de nouveaux Centre de formation consacrés :

  • aux métiers d’énergies renouvelables ;
  • à la mécanique despoids lourds, deux roues et moteurs hors-bord ;
  • au Tourisme et à hôtellerie ;
  • et enfin, à l’aviculture.

Avec nos récentes découvertes pétrolières et gazières, nous mettrons également en place un Institut National du Pétrole et du Gaz pour former aux métiers devant accompagner cette nouvelle perspective de l’économie sénégalaise.

Monsieur le Président,

Après 222 ans d’existence au service de la formation professionnelle, de la recherche et de la diffusion de la culture scientifique et technique, votre établissement totalise  assurément une remarquable somme d’expérience et d’expertise à partager.

Je sais qu’il existe déjà une convention de partenariat entre le CNAM, via l’Institut National des Techniques Economiques et Comptables (INTEC) et l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar, pour la formation en gestion et comptabilité à l'Ecole Supérieure Polytechnique. 

Je me réjouis que ce partenariat soit aujourd’hui élargi dans le cadre d’une Convention globale, parce que ce que vous faites si bien ici correspond exactement à la vision que j’ai d’un Sénégal doté des meilleures ressources humaines pour accélérer sa marche vers l’émergence et la prospérité.

En quête d’émergence, nous sommes heureux de rencontrer l’enfant des lumières.

Puisse l’esprit des lumières guider notre partenariat vers un futur radieux.

Je vous remercie de  votre aimable attention.