Discours du Président de la République au Forum de Dakar sur la Paix et la Sécurité en Afrique
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Discours du Président de la République au Forum de Dakar sur la Paix et la Sécurité en Afrique

Discours — 13 novembre 2017

Mes chers collègues et frères :

Ibrahim Boubacar Keïta, Président de la République du Mali,

Paul Kagamé, Président de la République du Rwanda,

Messieurs les Premiers Ministres du Tchad et du Sénégal,

Mesdames, Messieurs les Ministres,

Mesdames, Messieurs les hauts Représentants et Chefs de Délégations,

Monsieur le Président de la Commission de l’Union Africaine,

Monsieur le Président de la Commission de la CEDEAO,

Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs,

Mesdames, Messieurs les Représentants des Institutions internationales,

Mesdames, Messieurs,

Chers amis,

Je dois, en premier lieu, remercier chaleureusement les Présidents Faure Essozimna Gnassingbe, Ibrahim Boubacar Keïta et Paul Kagamé, qui honorent de leur présence cette 4e édition du  forum international de Dakar sur la paix et la sécurité en Afrique.

Je sais combien vos calendriers sont chargés chers frères et amis.  Merci d’être venus.

A vous, Président Keïta, je renouvelle notre  solidarité agissante. Le Sénégal est de tout cœur avec la République sœur du Mali pour le retour définitif de la paix et de la sécurité, dans l’unité nationale et l’intégrité territoriale du pays.

La paix au Mali, c’est la paix au Sénégal, c’est la paix dans notre sous-région.

C’est pourquoi je tiens à saluer vos efforts courageux pour la réconciliation nationale et la lutte contre le terrorisme au sein du G5 Sahel. Ce combat nous concerne tous, africains et non africains. Il mérite d’être soutenu.   

A tous et à toutes je souhaite la bienvenue et un agréable séjour au Sénégal.

Je remercie les pays et institutions partenaires pour le soutien qu’ils continuent d’apporter à l’organisation du forum de Dakar. Cela témoigne de notre vision solidaire des défis sécuritaires en Afrique et des solutions durables que nous voulons y apporter. 

La paix et la sécurité restent d’ailleurs au cœur des priorités du programme de réforme de l’Union Africaine sous le leadership du Président Paul Kagamé.

Au titre de ces priorités, figure la lutte contre la piraterie et autres actes illicites en mer ; comme en témoigne le Sommet extraordinaire de l’Union Africaine sur la sécurité et sûreté maritimes, tenu à Lomé en octobre 2016,.

Mesdames, Messieurs, 

Cette année, nous avons choisi de porter la réflexion sur la recherche de solutions intégrées face aux défis sécuritaires actuels de l’Afrique.

Ces défis, nous le savons, sont à la fois nombreux et complexes. Leur prise en charge efficace nécessite, en conséquence, des réponses diverses et complémentaires les unes des autres.

De toute évidence et en premier lieu, la riposte militaire sur le terrain contre les groupes terroristes est vitale. Nous ne pouvons pas laisser le champ libre à des forces dont le seul objectif est de semer la mort et le chaos. 

Mais la riposte militaire doit être solidaire et globale pour ne laisser aucun sanctuaire aux groupes terroristes.

Or, le risque aujourd’hui et pour les années à venir, c’est de voir des terroristes vaincus ailleurs chercher des zones de repli en Afrique pour y poursuivre leurs activités criminelles en s’attaquant aussi bien aux populations locales qu’aux intérêts étrangers.

Ce serait une erreur fatale de sous-estimer ce risque, ou de penser que le déplacement du spectre du terrorisme vers une zone donnée mettrait les autres à l’abri. Le terrorisme et ses causes doivent être traités partout avec la même détermination et le même ordre de priorité. C’est cela aussi l’approche intégrée. Tant qu’il reste une zone de vulnérabilité, nous continuerons tous d’être exposés à la menace.

Mais pour que la  riposte sur le terrain soit  efficace et cohérente, il faut des forces de défense et de sécurité suffisamment formées et entrainées ; suffisamment équipées et dotées de mandats clairs et robustes. Ce qui pose encore une fois la question des missions de paix des Nations Unies.

Face aux nouvelles menaces, les missions classiques de maintien de la paix ne sont plus adaptées. C’est le cas notamment avec la MINUSMA au Mali, sans doute l’une des missions de paix les plus meurtrières pour les casques bleus.

L’heure me semble venue de repenser sérieusement la doctrine du maintien de la paix des Nations Unies. On ne peut maintenir la paix là où elle n’existe pas, là où il faut plutôt la rétablir en combattant des groupes dont la violence est le seul mode d’action.

Deuxièmement, l’échange de renseignement et sa coordination sont tout aussi indispensables. Lorsque la bataille du renseignement est perdue, le combat contre l’insécurité et le terrorisme est perdu d’avance. Mais le renseignement est d’abord une affaire de professionnels.

Il ne s’accommode ni du spectacle ni du spectaculaire. Pour être efficace, le renseignement requiert surtout de l’intelligence et de la discrétion dans l’action. Il nécessite aussi  une vigilance citoyenne et un comportement patriotique de chacun.   

Troisièmement, nous devons intégrer davantage les risques liés aux Etats faillis.  Chaque fois qu’un Etat est affaibli d’une façon ou d’une autre, chaque fois que ses ressorts sont cassés, le vide se crée, le chaos et l’insécurité  s’installent. L’Etat failli offre un sanctuaire de rêve pour tous les réseaux mafieux et criminels, y compris ceux de l’émigration clandestine, parce qu’en face, il n’y a plus de loi, ni d’autorité organisée pour combattre et freiner ces groupes.

C’est pourquoi il faut se garder des solutions toutes faites, conçues et appliquées sans concertation avec les africains. Les conséquences de ces interventions, et nous le vivons au sahel,  sont souvent pires que le mal qu’elles étaient censées soigner. Comme il ne fait pas midi partout en même temps, chaque pays a une histoire, une expérience et des spécificités dont il convient de tenir compte.

Quatrièmement, enfin, il faut poursuivre sans relâche la bataille contre les défis sécuritaires par l’éducation, la formation, l’emploi et le développement inclusif.

C’est un impératif de premier ordre, parce que la pauvreté, l’ignorance et l’absence de perspectives d’une vie meilleure font le lit de la marginalisation qui mène à toutes les frustrations et alimente les risques d’extrémisme violent.

En réponse à ces facteurs d’instabilité, l’éducation, la formation, les activités génératrices de revenus, en particulier pour les jeunes, et le soutien aux zones défavorisées, doivent compter parmi les solutions durables aux défis sécuritaires.

A mon sens, le développement dans l’équité et la justice sociale reste une condition sine qua non de la paix et de la sécurité.

C’est dans cet esprit que nous avons initié au  Sénégal des programmes comme :

  • les Domaines agricoles communautaires ;
  • les Bourses de Sécurité Familiales,
  • la Couverture Maladie Universelle ;
  • et le Programme d’Urgence de Développement Communautaire.

Toutes ces initiatives ont un trait commun : lutter contre les injustices sociales par le développement inclusif et l’équité territoriale.

C’est ce que nous appelons « le Sénégal de tous, le Sénégal pour tous ».

J’espère que cette 4e édition du Forum de Dakar contribuera à mettre davantage en évidence cet impératif majeur pour l’Afrique.

Je souhaite plein succès aux travaux du Forum.

Je vous remercie.