Discours du Président Macky Sall en visite officielle au Kazakhstan
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Discours du Président Macky Sall en visite officielle au Kazakhstan

Discours — 21 mai 2016

Messieurs les Ministres,

Mesdames, Messieurs les Ambassadeurs,

Mesdames, Messieurs les membres du personnel enseignant et administratif,

Chers étudiants,

Chers invités,

Mes premiers mots seront pour remercier mon homologue, le Président Nursultan Nazarbayev, pour son aimable invitation et l’accueil chaleureux qui m’a été réservé, ainsi qu’à ma délégation.

Nous sommes heureux d’être au Kazakhstan, le pays éternel, le pays des steppes, au carrefour de l’« Eurasie ».

De Dakar à Astana, nous avons parcouru plus de 8600 kilomètres. Et malgré cette distance, nous nous sentons comme chez nous ici, parce qu’il y a quelque chose d’essentiel qui réduit la distance et qui rapproche.

Je veux évoquer les affinités fortes que partagent nos peuples. Le Sénégal et le Kazakhstan sont deux pays de diversité culturelle et de foi ; deux pays où un islam majoritaire cohabite pacifiquement avec d’autres religions ; deux pays animés par l’esprit d’ouverture et de dialogue.

Voilà pourquoi le Sénégal avait parrainé et soutenu l’admission du Kazakhstan à l’Organisation de la Coopération Islamique ; parce que nous étions convaincus de la contribution essentielle que votre pays pouvait apporter au rayonnement de la Oumma islamique et à la paix dans le monde.

Nous connaissons en effet l’attachement de votre pays à la paix.

Le Kazakhstan a, en effet, mené avec succès un processus volontaire de dénucléarisation complète et lancé une initiative majeure avec le projet ATOM, Abolish Testing-Our Mission, pour l’abandon complet des armes nucléaires.

Et au fil des ans, le Kazakhstan a affirmé un leadership fort dans le dialogue des religions, des cultures et des civilisations. En témoigne, la tenue chez vous du Congrès des dirigeants des religions mondiales et traditionnelles pour promouvoir la culture de la tolérance et du respect.

En témoigne, également, l’Exposition universelle Astana 2017. Le défi climatique auquel nous faisons face souligne la pertinence du thème d’Astana 2017 : «Énergie du Futur. Action pour la durabilité mondiale ».[

En témoigne, enfin, votre candidature au Conseil de Sécurité axée sur l’idéal de paix et de développement, y compris la prise en charge de la question stratégique de l’hydraulique. Là également, nous partageons un souci commun, puisqu’au titre de son mandat au Conseil, le Sénégal vient de tenir avec succès la toute première réunion du Conseil, en formule Aria, sur le thème « Eau, paix et Sécurité ».

Dans ce monde exténué par la guerre, la violence et des conflits, la volonté de paix et de fraternité humaine de votre pays force le respect et l’admiration.

L’histoire des relations humaines ne devrait pas en effet se réduire en une implacable juxtaposition de rapports de forces, de conflits d’intérêts et de folie meurtrière.

Nous devons œuvrer ensemble pour l’expression constamment revitalisée de la fraternité des peuples, au-delà de leurs diversités ; ce que mon illustre prédécesseur, feu le Président-poète Léopold Sedar Senghor, appelait la symbiose des cultures et des civilisations, qui préfigure la Civilisation de l’Universel.

Or, aujourd’hui, les servitudes matérielles tendent à dominer la noblesse d’esprit que confèrent les valeurs éthiques et morales. Notre monde est pris dans la spirale de l’ambivalence des vecteurs du progrès, quand la technologie détruit au lieu de construire, quand elle ôte des vies au lieu de les sauver. 

Lorsque l’homme est coupé de la fibre émotionnelle qui anime le désir de sociabilité et de coexistence pacifique, il cède fatalement à la méfiance, à la peur et à la tentation de dominer son prochain.

C’est ainsi que l’homme devient un loup pour l’homme, selon la formule de Thomas Hobbes. Alors, il perd en raison ce qui l’envahit en instinct. Il perd en sagesse ce qui l’occupe en animosité. Il fabrique plus de fusils que d’écoles, plus de bombes que d’hôpitaux, plus de missiles que de routes, de forages et de ponts. Bref, il construit plus d’engins de la mort que d’instruments pour la vie et le bien-être.

Ainsi, se pose à notre humanité commune la question philosophique de la finalité humaine. Que fait l‘homme sur terre ?

A cette question, votre pays a répondu par la réussite de son processus de dénucléarisation, par sa foi dans le dialogue des cultures et des civilisations, et par sa stratégie de développement « Nourly Jol-Voie vers l’avenir ».

Ces réponses combinées portent les noms de paix, de développement et de bien être comme destin de l’homme sur terre.

Le Sénégal croit fermement à ce destin ; et c’est là une autre affinité qui nous lie.

Notre pays est modeste par sa superficie, sa démographie et ses ressources naturelles, même si nous avons récemment découvert du pétrole et du gaz.

Mais nous avons foi en ce qui forge l’esprit et la grandeur d’âme de l’homme : nous croyons à la liberté, à l’éducation et à la formation.

Nous avons foi en ce qui fonde la coexistence pacifique des peuples : nous croyons à la tolérance et au respect de la diversité comme ferments de la culture de la paix.

C’est sur ces valeurs essentielles que le peuple sénégalais a bâti son idéal de Nation avant son indépendance en 1960.

Chez nous, 95% de musulmans vivent dans la plus grande fraternité avec leurs compatriotes chrétiens et de religion traditionnelle. 

Symboles du vivre ensemble sénégalais, des imams et des prêtres peuvent se côtoyer dans une même famille, et les fêtes religieuses dans leur diversité sont autant d’occasion de communion et de partage.

Chez nous, les choix politiques et la conduite des affaires publiques transcendent les considérations ethniques et religieuses.

C’est grâce à cet esprit du vivre ensemble que le premier Président du Sénégal, de confession chrétienne, a bénéficié du soutien de ses compatriotes musulmans et dirigé le Sénégal pendant 20 ans, avant de quitter volontairement le pouvoir.

Fait plutôt rare sur notre continent, le Sénégal n’a jamais connu de coup d’Etat en 56 ans d’indépendance.  Et c’est par la vertu de cet héritage démocratique que je me tiens devant vous comme quatrième président de notre histoire politique.

Voilà, chers amis, ce qui fait l’identité socio politique du Sénégal. Nous sommes fiers de cet héritage de nos anciens et confiants dans la durabilité de nos acquis.

Nous savons, en même temps, que nous devons transmettre aux générations futures non un legs figé dans le souvenir du passé, mais enrichi par le labeur des générations actuelles.

C’est l’ambition du Plan Sénégal Emergent que nous avons lancé en février 2014.

Avec le PSE, nous voulons améliorer les performances de notre économie par une croissance moyenne de 7% par an, durable et inclusive, pour faire du Sénégal un pays émergent à l’horizon 2035.

Le PSE vise un renouveau productif du Sénégal, fondé sur plus de partenariat que d’aide, par l’exploitation optimale des secteurs stratégiques de notre économie, notamment l’agriculture, les infrastructures, l’énergie, les mines, le tourisme, les Tic et l’habitat.

En deux ans d’exercice, nous avons réalisé d’importants projets dans le domaine des infrastructures, de l’agriculture, de l’énergie et de l’habitat. D’autres projets majeurs sont en cours, notamment une autoroute, une nouvelle ville, un aéroport et bientôt une ligne de train rapide. 

Ainsi, pour la première fois depuis 12 ans, le Sénégal a réalisé un taux de croissance du PIB de 6,5%.

Entre nos deux pays, le PSE nous offre une autre raison de coopérer en plus de nos affinités.

Au cœur du Kazakhstan, au croisement des grands axes qui relient l’Oural et la Sibérie occidentale, Astana est une composante dynamique du duo «Nouvel Etat, nouvelle capitale».

Je mesure à travers la grandeur et la beauté de vos réalisations la grande ambition intense et le savoir-faire maîtrisé de bâtir la voie du progrès qui mène au développement intégral de l’homme.

C’est la même aspiration qui nous anime au Sénégal et mobilise nos énergies autour du Plan Sénégal Emergent.

Et c’est pourquoi nous sommes disposés à ouvrir avec vous, par la collaboration officielle, par le commerce et l’investissement, un nouveau chapitre dans nos relations de partenariat mutuellement bénéfique et d’amitié conviviale.

Une de vos vieilles sagesses me fonde à croire que nous y parviendrons : « Dostyq joq jerdé tabys joq » : Là, où il n’y a pas d’amitié, il n’y a pas de succès.

Je vous remercie de votre aimable attention.