Discours du Président de la République lors de la deuxième session ordinaire de l'année 2017 du Parlement de la CEDEAO
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Discours du Président de la République lors de la deuxième session ordinaire de l'année 2017 du Parlement de la CEDEAO

Discours — 22 novembre 2017

Monsieur le Président du Parlement de la CEDEAO,

Messieurs les Présidents des Assemblées nationales,

Monsieur le Président de la Commission de la CEDEAO,

Mesdames, Messieurs les Ministres,

Honorables députés,

Excellences Mesdames et Messieurs les Ambassadeurs,

Distingués guides religieux et coutumiers, 

Mesdames, Messieurs,

Le Président Moustapha Cissé Lo a eu l’amabilité de me convier à cette 2e session ordinaire de l’année 2017 du Parlement de la CEDEAO.

Je vous en remercie, Monsieur le Président.

A vous et à vos collègues, j’adresse mes meilleurs vœux de succès dans l’exercice de vos mandats au service de notre communauté.

Je salue et remercie mon frère, le Président Muhammadu Buhari, pour son leadership et son engagement dans la gestion des affaires communautaires.

Si je suis parmi vous en ces lieux et circonstance, c’est parce qu’il y a 42 ans, des pionniers avaient vu juste et avaient vu loin, en associant leurs peuples autour d’un idéal communautaire, qui leur assigne un destin partagé.

Je veux rendre hommage aux pères fondateurs de la CEDEAO.

A l’époque, ceux de ma génération, encore dans l’adolescence, étaient loin d’imaginer que quelque part à Lagos, des pionniers, portés par une vision clairvoyante, étaient réunis pour jeter les bases de la grande œuvre d’intégration qui nous rassemble sous ce toit.

La CEDEAO nous assigne un destin commun. Elle nous rattache aussi à l’histoire des grands empires et royaumes qui, à travers les âges, ont regroupé des peuples ouest africains au-delà de nos frontières étatiques actuelles, à l’instar du Ghana, du Mali, du Dahomey, de l’OYO, du Jolof et du Tékrour

La CEDEAO, ce sont aussi des affinités socio culturelles multiséculaires ; c’est la richesse cumulée d’un espace de plus de 5 millions de km2, abritant plus de 300 millions d’habitants.

Voilà ce qui fonde notre vie en communauté. Voilà ce qui nous engage à être et à rester unis pour entretenir et parachever l’œuvre des pionniers.

En vérité, nous n’avons pas d’autre alternative. L’histoire contemporaine nous parle, pour nous dire que l’avenir des peuples au 21e siècle réside dans les grands ensembles.

Seul un grand ensemble ouest africain prospère, intégré et solidaire nous aidera, en effet, à soutenir le rythme effréné d’une mondialisation où s’entrechoquent opportunités, risques et incertitudes.

En dépit des difficultés inhérentes à la poursuite de notre dessein commun, je suis convaincu que la réalisation d’une CEDEAO des peuples est à notre portée.

Et nous sommes, assurément, dans le sens de l’histoire.

Nous sommes dans le sens de l’histoire, car au cours de ses 42 ans d’existence, la CEDEAO a forgé une solide pratique communautaire qui lui confère la force d’une identité propre en matière d’intégration africaine.

Nous sommes dans le sens de l’histoire, parce que dans des domaines aussi divers et complexes que la prévention des conflits, le rétablissement et le maintien de la paix, l’encadrement des processus électoraux et le développement économique et social, les acquis de l’Organisation sont considérables et nous ouvrent des perspectives encore meilleures.

Nous sommes dans le sens de l’histoire, quand on considère les progrès de la démocratie dans notre sous-région, où la tenue d’élections libres et transparentes est devenue la règle, en même temps que nous refusons tout recours à la force pour accéder ou se maintenir au pouvoir.

Nous sommes dans le sens de l’histoire, parce que la Vision 2020 adoptée en 2007, a installé l’élan, que nous voulons irréversible, d’une CEDEAO des peuples qui porte l’ambition d’une Communauté démocratique et prospère, dans un espace communautaire ouest-africain stable et prospère, où les populations vivent dans la dignité et la paix.

A ces fins, les Etats membres ont établi la libre circulation des personnes et des biens, instauré un passeport et une carte d’identité communautaires, adopté un Tarif Extérieur Commun et balisé le chemin vers l’objectif d’une monnaie commune.

S’y ajoute la réalisation progressive d’infrastructures communautaires qui nous relient les uns aux autres.

Toute cette dynamique communautaire montre que la CEDEAO des peuples est en marche.

Mais c’est une marche d’un rythme exigeant, une marche de longue haleine, une marche où des obstacles apparaissent à mesure que d’autres sont levés. 

Cependant, nous sommes tenus d’aller de l’avant.

Et plus nous irons de l’avant, plus nous aurons besoin d’institutions plus robustes et mieux adaptées à des missions elles-mêmes devenues encore plus nombreuses et plus complexes.

Plus nous irons de l’avant, plus nous serons appelés à prendre des décisions qui touchent le quotidien de nos Etats et impactent directement les conditions de vie de nos citoyens.

Plus nous irons de l’avant, plus nous devrons mobiliser davantage d’efforts et de ressources au soutien de nos politiques communautaires.

Plus nous irons de l’avant, plus le citoyen de la CEDEAO doit se sentir chez lui, partout dans l’espace communautaire.

Telle est la finalité ultime de l’objectif d’intégration.

Or, et il le faut regretter, trop d’obstacles continuent encore d’obstruer l’horizon de l’espace communautaire.

 

La Task Force sur le Schéma de Libéralisation des Echanges de la CEDEAO dépêchée récemment dans plusieurs pays membres a confirmé cette réalité sans cesse déplorée mais non encore résolue ; à savoir la persistance de pratiques anormales, telles que les barrières non tarifaires, ainsi que les tracasseries et perceptions indues aux frontières.

Il faut le dire sans détour : ces pratiques sont contraires aux textes communautaires. Elles pénalisent les citoyens et portent gravement atteinte aux échanges dans un espace dont la vocation est de devenir un marché commun.

Si nous ne voulons pas que le marché commun apparaisse comme une ligne d’horizon, qui recule quand elle semble toute proche, nous devons travailler davantage à lever ces entraves. Tout comme il convient d’œuvrer à l’application par tous les Etats membres des décisions concernant la carte d’identité communautaire, le Tarif Extérieur Commun et le versement du prélèvement communautaire, pour assurer à l’Organisation l’autonomie budgétaire compatible avec ses missions.

Car, ne l’oublions pas : qu’elles portent sur la paix ou le développement, ces missions nous incombent en premier lieu. Nous ne pouvons les réaliser de façon crédible, efficace et durable qu’en comptant sur nos propres ressources. C’est une question de bon sens et de responsabilité, surtout en ces temps où nous faisons face à la menace terroriste et au défi de la migration clandestine.

Financer l’Organisation, mais aussi la réformer et la rationaliser.

Depuis la transformation du Secrétariat exécutif en Commission, l’architecture institutionnelle de la CEDEAO a subi des mutations profondes, parfois à la limite de l’instabilité.

Le moment est sans doute venu d’assurer à l’Organisation une assise institutionnelle rationalisée et stable, moderne et efficace pour relever avec succès les défis de son temps.

Relever ces défis exige une Institution qui dépense moins dans le fonctionnement pour investir plus et mieux dans la réalisation de projets d’infrastructures communautaires de développement.

J’engage le Président de la Commission à poursuivre les mesures déjà prises dans ce sens.

Ce faisant, veillons également à la répartition équitable des projets réalisés dans l’espace communautaire. C’est une exigence de la vision solidaire et inclusive que porte la CEDEAO des peuples.

Convenons, enfin, d’une articulation institutionnelle harmonieuse et réaliste, où chaque organe, y compris le Parlement, joue un rôle qui fortifie l’œuvre communautaire en évitant le dédoublement du processus décisionnel et en répondant aux impératifs de bonne gouvernance, de diligence et de résultat.

J’ai l’intime conviction que c’est à ce prix que nous atteindrons l’objectif d’intégration que les pères fondateurs avaient consigné dans l’acte de naissance de la CEDEAO il y a 42 ans.

Quarante-deux ans après, nous devons sans cesse tenir ferme et vivace la flamme de l’intégration, afin qu’elle continue d’éclairer notre marche commune vers la CEDEAO des peuples.

Nous le devons aux anciens. Nous le devons à nous-mêmes. Nous le devons aux générations futures.

Et nul endroit n’est mieux indiqué pour porter et amplifier ce message que cette auguste Assemblée.

Vive la CEDEAO des peuples !

Je vous remercie de votre aimable attention.